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NAÎTRE À L'ÂME OR

Méditation de Frédérique Lemarchand

Frédérique Lemarchand

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Je salue de toute mon âme tous les auditeurs,

 

La mort est traitée avec déni dans nos sociétés contemporaines.

Nous fuyons ceux qui nous parlent de la mort.

 

Nous préférons mourir brutalement dans un accident par exemple.

« La modernité est le crime parfait – même le mort ne s’aperçoit pas qu’il est mort. »

 

Alors qu’être ontologiquement prêt pour accompagner quelqu’un ou soi-même est libérant.  
Le temps initiatique du trépas est primordial.

Marie de Hennezel racontait l’histoire d’une femme qui résistait et souffrait atrocement lors de son agonie. Lorsque sa sœur jumelle s’est lovée contre elle comme à l’état fœtal, elle est décédée apaisée.

C’est très beau lorsque Mme de Hennezel exprime aussi que plutôt que de faire disparaître discrètement les défunts des hôpitaux, on pourrait former une haie d’honneur au moment de leur naissance au ciel ! J’aurais tant voulu célébrer de cette belle manière nombreux départs de mes compagnons qui ont traversé leur croix.

Cette vie face à la mort n’est pas lugubre.

Elle fait muter la structure du monde et par-là le transfigure.

 

Par les épreuves de dépouillements successifs, nous nous acheminons de la vie que l’on a, à la vie que l’on est.

 

Au fond, nous sommes tout ce que nous avons perdu.

...

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Je salue chaque être qui respire de manière unique.

Nous vivons le miracle de respirer ensemble.

Nous sommes traversés par un souffle dont on ne sait d’où il vient ni où il va.

Souffle qui réunit tout.

 

Ouvrons-nous pour l’accueillir et nous accueillir.

 

Nous connaissons tous des choses qui ont triomphé de la mort.

Le jour naît de la nuit.

 

La mort n’est point notre issue.

 

Mais si nous ne nous retournons pas en la vie triomphante, nous demeurons aliénés à une vision fermée où, quoi que nous fassions, nous finissons par être le jouet du monde extérieur faisant de la mort la case d’arrivée !

L’humanité coupée de sa source d’amour est chosifiée.

L’Homme sacrifié est broyé sous les sabots des cavaliers de l’argent.

Aucune vie n’est vécue.

 

La naissance commence après la mort.

 

Alors naître ou ne pas naître ?

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La danse de Jacob avec l'Ange

Je ne suis pas née vivante, je le deviens.

 

Un cœur qui n’avait pas même un lendemain à vivre, c’est le mien.

 

J’ai la grâce d’être née avec une malformation dont le pronostic vital établi par les médecins est d’une petite dizaine d’années sur terre. J’avais comme une couronne d’épines de plus en plus serrée autour de mon cœur. L’annonce de ma mort a fait place nette autour de moi, l’entourage désespéré n’étant accompagné ni psychologiquement ni spirituellement, s’écarta.

Je vis pleinement la mort.    
Rien ne me faisait obstacle à cette initiation.

La mort c’est comme un maître d’école !
Être seule dans les couloirs de la mort m’a irradiée de songes.

Ma croix n’est pas accablante mais libérante.
Ma vie s’est transfigurée en un festin éclatant de lumière.
Traversant des successions de morts et renaissances, la mort me fait naître de plus en plus vivante.
Toujours prête à mourir et toujours renaissante, je deviens infiniment douée de Vie - d’une vie qui refuse de se laisser ensevelir.

« Je ne meure pas, j’entre dans la vie. »

Non, je n’ai pas terrassé la mort - Ce serait bien arrogant ! Mais je l’ai intégrée amoureusement, ce qui dilate ma vie. Que je vive ou que je meure, je suis vivante.

 

Je refuse de m’inquiéter pour l’avenir car je respire la grâce.

 

Cette curieuse perspective, d’envisager la vie à partir de la mort, renverse tout.

À chaque expiration, je bois la mort le plus consciemment possible et je me laisse inspirer par la soif de vivre.

Intégrer la mort de manière consubstantielle, c’est intégrer les énergies de peur, de rejet, de désespoir jusqu’aux pulsions suicidaires qui, une fois retournées en corps et sang divins, donnent une formidable insufflation de vie alors que les refouler éteint la vie.

 

La mort est une maîtresse dans l’art du renversement.

C’est au cœur de nos ombres que la lumière de la vie nous convoque.

 

La mort est le combustible pour faire de toute la matière, qui nous est confiée pendant un temps, quelque chose d’autre ; afin d’aller au-delà de la création et du monde, comme Dieu est allé au-delà de lui-même dans son acte créateur.

Toute création véritable est un don à l’avenir.

 

« Ma petite sœur la mort corporelle » est le chemin de la grande décantation.

Je bénis ce corps temporel où se manifeste la Vie éternelle.

Je suis une sorte de chapelle de chair où le mystère flambe tout entier à travers le vitrail de mon cœur.

 

L’Esprit grandit là où le petit moi psycho-physiologique diminue dans une relation entre mort et vie, entre épines et foudre, où le génie de la condition humaine, sous la poussée divine, saisit que la limite est en fait le véritable visage de l’infini.

 

Le visage n’est-il pas la préfiguration de l’Infigurable ?

Le divin nous est voilé par excès de sa proximité.

 

Notre peur de mourir n’est-elle pas la preuve que nous sommes configurés pour vivre éternellement ?

 

Boire la coupe amère provoque la sueur du Golgotha.

C’est une gorgée pour la descente du ciel.

Dieu c’est l’abîme, alors si on supprime l’abîme, on se supprime !

 

Quand on fait l’expérience de la nuit, c’est là que la croix de lumière apparaît.

Par grâce, notre capacité à intégrer nos épreuves comme des bénédictions est la juste mesure de notre amour.

Accepter de mourir nous rend libres.

 

Qu’ai-je à craindre même si la mort me menaçait ?

« La vie n’est pas courte mais le temps est compté. »

 

A partir de là, tout est béni jusqu’à notre crucifixion qui nous permet de mourir à tout ce qui nous tue afin d’accomplir notre mutation évolutive.

Mourir à nos savoirs trop étroits, aux étiquettes étriquées, aux médailles encombrantes, à nos vanités, aux conditionnements, à la bonne morale, c’est se départir de l’inessentiel afin de passer des ténèbres du dehors au dedans par le chas de l’aiguille dont parle la tradition hébraïque !

 

Alors bénissons la vie, cette bohémienne qui nous dépouille de tout.

« Il faut que la vie nous arrache le cœur, sinon, ce n’est pas la vie ! »

Celui qui ne s’est jamais arraché n’a point de royaume car le seul est celui du « va vers toi » !

 

Dans le livre du Zohar*, Le Saint Béni Soit-il se sert de la lettre hébraïque « Beith » qui correspond au « B » de notre alphabet latin pour opérer la création du monde car elle est justement l’initiale du mot Bénir. La calligraphie de cette lettre Beith ressemble à une bouche grande ouverte qui boit la coupe emplie de toute l’Odyssée Biblique. Et la grande sagesse du Beith qui vaut 2, est de savoir que la force qui fait avancer est la séparation.

 

L’enfer serait de maudire ce terrifiant mystère.

 

Maurice Zundel parle d’une femme déportée qui avait vécu, dans l’enfer concentrationnaire, une expérience spirituelle entièrement neuve, qui lui paraissait si précieuse qu’elle éprouva sa libération comme une menace contre le plus grand des biens. La manière d’accueillir le malheur peut donc changer le sens d’un évènement qui semble, à première vue, purement catastrophique.

 

Dans une époque de déportation de notre intériorité, nous nous accommodons du trou que nous nous sommes creusés en terre d’exil.

 

Mais attention, restons vigilants pour demeurer vivants jusque dans la mort du corps du monde, nous sommes la germination de La Lumière.

 

Le seul mal est de mépriser l’être qui bat le rappel de la vie en Esprit.

 

L’aventure de la greffe d’organes se réalise à partir du pire, à partir du drame de la mort souvent accidentelle.

La famille endeuillée prend l’incommensurable décision au cœur de l’inconsolable, l’amour est plus fort que la mort.

 

Le corps n’est-il pas donné que pour donner ?

« Donnez sans hésiter votre cœur à tout ce qui est beau, ainsi il battra éternellement. »

On va toujours au-delà en se dépouillant.

 

La transplantation devient une épopée fantastique !

La mort donne la vie.

 

L’anesthésiste m’endort dans un flocon de neige le 11 février 2012.

Après 20 ans d’attente de ma greffe, je suis miraculeusement synchrone avec le jour du plus grand rassemblement de prières faites pour les malades dans le monde, le jour de Notre Dame de Lourdes.

 

Je suis descendue dans ma chair pour escalader la nuit.

Dans l’épreuve plantée dans le risque, arrosée de sang, ma foi prend racine.

Je respire désormais un parfum d’éternité.

 

Je m’incline de toute mon âme devant les donneurs de toutes les couleurs du même sang de Dieu. Ils donnent leur corps pour la multitude des vivants. Je rends grâce aux endeuillés qui acceptent le don d’organes et qui parviennent à ressentir le caractère transcendantal de leur décision. Je suis dans une gratitude inouïe d’avoir reçu la bouture divine d’un cœur et 2 poumons grâce à la prouesse d’une équipe médicale extrêmement humaine.

 

Mon sauveur est mort et ressuscite en moi.

J’enveloppe mon donneur d’une gratitude de chair, incorporer la mort c’est recevoir la vie comme un don d’une générosité sans prix.

L’organe de la reconnaissance est éternel pour tous ceux qui, même au cœur du chagrin bénissent la vie.

 

Notre étoffe temporelle cousue de larmes, brodée d’émerveillements est bénie, c’est la bien-aimée à laquelle le bien-aimé n’échappe pas.

 

Dieu ne résiste pas, c’est nous qui Lui résistons…

 

Qu’on le veuille ou non, nous sommes promis à l’amour, à l’Amour inouï.

Et inconsciemment nous plaçons depuis toujours des adversaires redoutables aux commandes du monde pour tailler dans l’arbre de vie notre couronne d’épines, la lance et la croix = LA CROIX PASCALE.

Allons vers notre incontournable initiation dans un consentement à mourir d’Amour.

Avec non pas l’intelligence artificielle mais la connaissance divine reçue dans l’expérience vécue dans le corps, l’épreuve devient génératrice de mutation.

 

Entrons dans la danse nuptiale et laissons-nous danser, soulever par le souffle du vivant.

Danse qui fait de l’interruption, un chemin nouveau,

qui transfigure la chute en un pas de danse où l’on tombe vers le haut,

qui fait de la peur, un escalier, du rêve, un pont, de la recherche… une Rencontre.

 

Par le bas, nous nous élevons vers le haut d’un seul mouvement !

 

Il y a 100 morts entre l’amour et la lumière.

Passons le gué avec l’ange de la nuit de l’âme le plus consciemment possible. Entraînons-nous comme la monture de notre âme devant des obstacles de plus en plus haut jusqu’au saut de l’ange. Mourir avant de mourir permet de nous séparer amoureusement de ce que nous avons de plus cher.

Le chemin n’est pas impossible.

 

L’Impossible est le chemin !

 

Malheureusement, il y aura toujours plus de lois contraignantes et de règlements extérieurs en conséquence de nos omissions aux lois intérieures.

Toute civilisation coupée du verbe fondateur s’effondre.

Cela demande à nous élever au niveau ontologique de notre être, afin de ne pas interrompre le processus de spiritualisation du corps pour devenir corps de lumière.

Car nous allons vers la totalité de notre être.

 

Il y a 2 siècles en Russie, un saint ayant traversé plusieurs morts (d’une chute mortelle d’un échafaudage enfant et de s’être retrouvé roué de coups à mort par des voleurs), transmet à un disciple appelé Motovilov comment se laisser remplir et illuminer par le Saint-Esprit. Le moine transmet d’une manière expérimentale le Saint-Esprit car malheureusement nous sommes arrivés à une terrifiante tiédeur dans la foi.

Dans une clairière, pendant que la neige tombe, il prend le jeune homme par les épaules et se met à prier. Et les voilà plongés tous les deux dans l’étincelante lumière de la Présence :

« Je ne puis plus vous regarder Père, des foudres jaillissent de vos yeux. Votre visage est devenu plus lumineux que le soleil ! »

N’ayez pas peur ! dit le Staretz à Motovilov.

Vous êtes à présent dans la plénitude de l’Esprit-Saint. Autrement vous n’auriez pu me voir. Être laïc n’a pas d’importance, ajoute le moine : c’est la foi et l’amour qui comptent car c’est dans le coeur que s’établit le royaume de Dieu.

 

Alors laissons-nous mouvoir par l’action de grâce sans jamais la devancer ni la ralentir.

Libérons-nous de notre volonté propre car elle donne toujours les rênes au Satan, et honorons notre participation temporelle à l’aventure éternelle.

Nous sommes le temps nécessaire au devenir divin.

 

Ne croyez pas que la mort soit un échec, c’est l’amoureux accomplissement d’une alchimie.

« Notre tunique suffisamment lacérée par les hommes retrouvera l’éclat de sa lumière. »

 

Il n’y a que perdre sa vie qui ait toujours le même visage.

Alors pourquoi ne pas oser parier sur l’homme intérieur, sur l’immensité qui nous habite ?

Notre vie en dépend !

 

Par la croix vivante, nous sommes l’issue où il n’y en a pas, pour passer de l’enfer à l’ouvert.

Notre croix n’est pas ce lourd sac de clous et d’épines mais notre appartenance à un monde à plusieurs dimensions.

 

« La croix est le lieu où l’Homme et Dieu se croisent. »

C’est la rencontre de 2 cœurs : l’un qui saigne, l’autre qui s’ouvre.

 

Clouée sur un lit d’hôpital, amputée de ma propre volonté, j’y gagnais en forces vives de la non-résistance.

Lors de ma transplantation cœur-poumons, j’ai vécu l’expérience du coma, restant 40 jours en soins intensifs. Lors de cette expérience hautement initiatique à l’état végétatif, j’ai pu explorer des champs de conscience extrêmement précieux et depuis j’ai le regard non-arrêté. Je vois les adversaires comme d’impitoyables entraîneurs spirituels. Je ressens au plus profond que tout est sacré.

Que les êtres les plus cruels sont des êtres blessés, toujours confondus avec leur ombre ils demeurent esclaves des énergies inconscientes qui les manipulent.

La maladie est comme quelque chose qui mute en mieux parfois en pire.

La mort elle-même m’échappe. Rien n’est définitif nulle part !

 

Quoi de plus mouvant que la vie ?

Tout se transforme : le vivant n’est pas claquemurable.

 

Ce qui nous empêche de faire corps avec la vie, c’est l’illusion de pouvoir saisir la vie, de vouloir la détenir comme on détiendrait un détenu. Alors, on en perd sa vibration.

 

La vie est une prière que l’amour seul peut exaucer.

 

Et si le monde faisait semblant d’être une matière temporelle et que secrètement il n’était qu’ondes d’Amour infini aux multiples visages ?

L’estocade du monde laisserait place à un avenir inconnu où nous sommes tous engagés pour rejoindre une nouvelle conscience dont nous ne connaissons pas les contours.

Il y a ce que l’on connaît qui est étroit - il y a ce que l’on sent qui est infini.

 

Le nihilisme n’aura pas le dernier mot.

Nous devenons ce que nous envisageons.

Si je ne vois que malédiction et ne montre que la finitude et le chaos, je le deviens.

Si je me retourne vers l’éternel avec gratitude, je resplendis Sa lumière.

 

Notre épreuve collective est chargée de pratiquer sur nous l’ouverture désirée pour naître à un amour spirituel.

Nous sommes le monde, chacun de nous le porte, le couve et nous en sommes responsables.

« Pardonner ce qu’il est, ce que chacun de nous est, nous permet de toucher au Un », me confie Annick de Souzenelle.

À l’instar de Celui qui ouvre notre Cœur-Christ capable de dire « pardonne-leur, ils ne savent pas ce qu’ils font » nous pouvons toucher au Un en plongeant au plus profond du principe de l’Être.

Depuis cette conscience, même si nous savons que tout est perdu, il y a un principe qui sauve tout.

 

La Lumière de résurrection greffée dans nos poitrines marche sur les eaux agitées de l’humanité.

Sa vraie gloire est ici.

 

Pour ma part, la mort à moi-même aiguise mon attention.

Sur la fine pointe de l’instant pur, je reçois l’effusion de la Présence.

Le corps est cendre et la chair est feu où l’âme est flamme.

N’être plus qu’un calice où l’intensité vient se baigner.

 

J’ai reçu cette grâce lors de l’opération.

J’ai franchi le mur du temps lorsque de battre mon cœur s’est arrêté.

J’ai touché l’immensité où je suis allée de la vie à la vie.

Rien ne manquait - évidée par la foudre, j’étais comblée d’Amour.

Je suis Amour et nous le sommes tous !

Tout est lumière indéfinissable.

 

Depuis cette bouture divine, j’ai réalisé que derrière le pire, il n’y a rien à craindre !

Rien ne peut ôter l’Amour, seule meurt la peur.

L’amour est ce qu’il reste lorsqu’il ne reste rien.

L’amour qui a fondé nos êtres, n’encourt aucun risque de destruction.

 

Alors pourquoi vivre petit, nous ne mesurons pas la puissance d’Amour dont on est fait comme l’exprime si bien Nelson Mandela, libéré, lui aussi dans la synchronicité d’un 11 février!
Nous sommes nés pour rendre manifeste l’Amour inconditionnel qui est au-dedans de nous.
En laissant notre lumière briller, nous donnons incidemment aux autres la permission d’en faire autant.

Lorsque nous sommes libérés de notre propre peur ; notre présence libère automatiquement les autres.

Ce Principe de libération se trouve dans le cœur. C’est vrai ce que dit le Petit Prince : « L’essentiel est invisible aux yeux, on ne voit bien qu’avec le cœur. »

 

Allons ensemble vers le plus grand secret d’amour.

Demandons la grâce du pardon pour nous détacher et nous libérer des lois du monde.

Souvenons-nous des plus belles intensités que nous avons vécues mais qui ne sont qu’infimes prémices.

Toutes les beautés de ce monde ne sont rien, tout l’amour reçu n’est rien.

Laissons-nous aimer. Ouvrons les mains, le cœur, desserrons les mâchoires, relâchons la respiration. Au-delà de la souffrance c’est l’Amour qui nous cherche.

Abandonnons-nous à cet Amour inouï qui vient nous étreindre.

Laissons-nous inspirer d’amour et expirer dans l’Amour total.

Il n’y a plus de lutte car tout est infiniment aimant.

 

Ne portons plus rien – ne portons plus ! Laissons l’Amour nous porter.

Notre chair de temps se combine à la lumière éternelle.

Le travail de dilatation du cœur se fait.

Nous naissons à l’Amour.

 

La prière donne assez d’eau parlante pour que le corps spirituel embrasse le corps physique.

 

Marie Madeleine, capable de voir le Ressuscité, est la Grande d’Amour de cette naissance en Esprit en vérité.

Elle nous greffe une reconnaissance inouïe pour ne plus voir que l’Amour.

C’est l’organe de résurrection qui anime l’humanité.

 

Je remercie tous les priants qui accompagnent, soutiennent nos naissances à l’Amour. Être absolument l’Amour est la seule chose que nous avons à vivre.
Un Amour fort, capable de toutes les mutations.

 

Devenir Amour ne nous fait pas disparaître mais apparaître.

 

Voici les derniers mots de Sainte Thérèse avant d’ouvrir la toute toute petite porte du ciel :

 

« Je ne me repens pas de m’être livrée à l’amour.

Oh non, je ne me repens pas, au contraire !

Je vois que j’ai cru,

je possède ce que j’ai espéré,

je suis unie à celui que j’ai aimé de toute ma puissance d’aimer. »

 

...

 

J’aimerais vous faire sentir que cette aventure n’appartient pas qu’aux mystiques, c’est le chemin de sainteté que chacun peut suivre.

Je vais vous partager une expérience très concrète que je viens de vivre.

J’habite la colline de Vézelay et en ce moment, nous avons la chance de recevoir la visite de Ahmed qui vient du Burkina Faso pour nous transmettre l’enseignement de la sculpture en bronze.

 

Nous nous retrouvons le matin au beau milieu d’un pré dans le petit village de Saint-Père en contrebas de la colline. Nous commençons par allumer un feu autour duquel nous nous installons assis sur un tabouret. Je travaille silencieusement mes sculptures en cire d’abeilles à l’aide d’outils rudimentaires en métal que je fais chauffer sur les braises pour faire fondre la cire au gré de l’Inspiration.

 

Ensuite nous avons fabriqué un moule réfractaire avec de la terre chamottée mélangée à du crottin d’âne pour envelopper la cire qui, une fois fondue, cédera sa place au bronze.

 

Pendant ce temps, Ahmed récupère tout un tas de choses insolites. Je vois défiler des douilles, des obus et autres objets en cuivre et en étain qu’il liquéfie dans un creuset pour que leur alliage devienne du bronze.

 

J’aime la simplicité du feu autour duquel nous nous retrouvons et ce drôle d’atelier à ciel ouvert aux odeurs de cire et de fumée.

Avec mon frère Ahmed, l’essentiel est là.

 

Tout est d’une merveilleuse simplicité. C’est ô combien « espérant » !

 

Pourquoi est-ce si « espérant » pour moi ?

Parce que le feu est le dépouillement même où la grande Vie se tient.

Parce que je contemple d’incroyables transformations de la matière - par exemple celle de toutes ces armes qui, en fondant, deviennent œuvres d’art.

 

En vérité, j’assiste à un processus de morts et de renaissances hautement mystique.

Car je transpose symboliquement la cire en tant que notre ego qui, en disparaissant livre passage au bronze incandescent ! Quel athanor merveilleux !

J’assiste au retournement de toutes nos pulsions destructrices, matérialisées par les obus, les douilles etc. fondues au Feu divin : elles se transforment en une énergie nouvelle chargée d’une tout autre information.

Louée la mort ! louée la vie ! Comme un alliage inséparable.

 

En nous transmute le métal de notre mental dans le creuset du cœur où fondent les scories du non-amour.

 

En cet instant si intense, je ressens que la capitulation de tout notre système de défenses est notre vraie défense, celle de l’amour. Je peux vous dire qu’au cœur de l’impuissance, me voici invulnérable.

 

Je reçois la grâce que nos combustions sont illuminatives :

« Nous sommes crus, puis cuits, avant d’être embrasés pour la transmutation de l’âme » exprime si bien la tradition soufie que mon Maître bronzier incarne.

 

La mort est le point de départ de la création, donc le point de départ des vivants.

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L'acrobate, comme dans la Basilique de Vézelay

Guillaume, je vous remets cette pièce en bronze patinée réalisée pour Annick de Souzenelle que vous allez voir bientôt, il s’agit du combat de Jacob avec l’Ange.

 

Jacob en affrontant la mort a reçu son Saint-Nom.

 

J’ai une infinie gratitude pour toute la corbeille du langage que j’ai emprunté à François Cheng, Rilke, Christiane Singer, Saint François, Pessoa, Corbin, Grosjean, Etty Hillesum, Thérèse, Malek Jân Ne’Mati, Annick de Souzenelle avec le muguet rouge de Christian Bobin.

 

Merci à tous les auditeurs de Zeteo.

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